Infographie : à chaque profil son cadre de travail idéal

Pour avoir de bons rapports avec ses collaborateurs, il faut tenir compte de leurs personnalités. Une méthode américaine permet de les analyser.

Essayez donc de parler plannings et reportings à un fonceur, de jouer sur les sentiments avec un cérébral ou de perturber l’emploi du temps d’un bourreau de travail. Vous risquez fort de vous heurter à des murs, voire de compromettre vos relations avec eux. Pour parvenir à trouver votre place dans une équipe, a fortiori si elle vous est inconnue, vous devez d’abord apprendre à décrypter les personnalités qui la composent. Pour cela, vous n’avez besoin que d’un peu d’observation et… des outils mis à votre disposition par la «Process Communication».

Une méthode adoptée par la Nasa

Cette appellation, qui a l’air sortie de l’univers de «Star Trek», est le nom d’un modèle d’analyse des comportements élaboré dans les années 1970 par le psychologue américain Taibi Kahler. Ce n’est ni le premier ni le seul. Mais, contrairement aux MBTI, HBDI, Disc et au bilan Interqualia, la Process Com a connu un essor étonnant. Il faut dire que tous les modèles d’analyse comportementale n’ont pas eu les honneurs de la Nasa ! Contacté en 1979 par l’agence spatiale américaine, Taibi Kahler a aidé pendant vingt ans à composer les équipages des missions spatiales, dont les membres devaient à tout prix vivre ensemble sans heurts. En retour, ses travaux de recherche furent largement financés par la Nasa. Dans les années 1990, le psychologue américain bénéficiait d’une telle réputation qu’il devint même l’un des conseillers du président Bill Clinton.

La Process Com est donc une méthode pour comprendre les grands traits de la personnalité d’un interlocuteur et adapter en conséquence sa communication avec lui. Elle définit six profils distincts : l’«empathique», le «travaillomane» (une traduction libre de «workaholic», accro au travail), le «persévérant», le «rêveur», le «promoteur» et le «rebelle» (voir le tableau en pages 46 et 47). Selon Taibi Kahler, nous tendons tous, dès notre prime enfance, vers l’un de ces six caractères, qui devient notre «base». Cette base est immuable. S’y ajoute éventuellement un deuxième profil, temporaire celui-là : la «phase», notre besoin psychologique du moment. «Une phase peut durer entre deux ans et toute la vie, explique Gérard Collignon, détenteur des droits de la Process Com pour l’Europe au travers de sa structure de conseil, Kahler Communication France. Mais, pour un tiers de la population, la base et la phase sont identiques.»

Chaque personnalité complète et équilibre les autres

La Process Com offre de nombreuses possibilités. D’abord de mieux se connaître soi-même et de comprendre les autres. Elle permet aussi de prédire comment vont se comporter les individus sous l’emprise du stress, quand leur profil dominant est exacerbé. Par ailleurs, elle aidera celui qui maîtrise les caractéristiques des six profils à trouver le ton juste selon la personnalité de son interlocuteur et les nécessités de l’environnement. Enfin, et même si la démarche peut paraître un peu arbitraire, elle fournit des repères pour déterminer le cadre de travail le plus adapté à chacun selon deux variables : les sources de motivation (interne ou externe) et la capacité à œuvrer en équipe (voir le schéma ci-dessus).

Aucun de ces six profils n’est bon ou mauvais en soi. Tous comportent leurs points forts et leurs inconvénients, notamment face au stress. C’est la force de ce modèle : offrir une grille de lecture des personnalités, sachant que chacune complète et équilibre les autres. «L’équipe idéale serait constituée d’une personne appartenant à chacun des caractères», estime Gérard Collignon, auteur de «Comment leur dire… La Process Communication» (InterEditions).

Existe-t-il un caractère majoritaire ? On pourrait aussi imaginer que l’ensemble de la population se répartit équitablement entre les six profils. C’est bien connu, il faut de tout pour faire un monde. En fait, on estime que 30% de la population occidentale aurait une base empathique et 25% une base travaillomane. Puis viendraient les rebelles (20%), les persévérants et les rêveurs (10% chacun), enfin les promoteurs (5%). «Ces chiffres sont à prendre avec précaution, nuance Gérard Collignon. Ils sont issus des observations menées par Taibi Kahler dans les années 1980 aux Etats-Unis. Mais nous avons conduit quelques études en France au début des années 2000. Et les résultats corroborent largement ceux de Kahler.»

 

Identifiez le profil de votre interlocuteur

L’EMPATHIQUE
Sa vision du monde et ses points forts : Compatissant, sensible, chaleureux, il perçoit le monde à travers le filtre des émotions. Il n’hésite pas à montrer les sentiments qui le traversent et fait confiance à son intuition, sans pouvoir toujours expliquer ni rationaliser ses choix.
Sa question existentielle : Suis-je aimable ?
Ses besoins psychologiques : Il demande moins à être reconnu pour ce qu’il fait que pour ce qu’il est, en tant que personne. A noter que sa grande sensibilité le conduit aussi à chercher
à satisfaire ses cinq sens.
Ses réactions sous l’effet du stress : Soumis à un stress modéré, il en fait trop dans le but de faire plaisir. Il n’arrive pas à dire non, a du mal à s’affirmer. Face à un stress intense, il se met à faire des erreurs stupides, se victimise et a tendance à se sentir mal aimé.
Comment le manager pour en tirer le meilleur ? Abordez-le par le biais des sentiments et des émotions. Montrez-vous chaleureux ou, à défaut, témoignez-lui de l’attention : “Installe-toi bien, je t’écoute.” Il doit comprendre que vous l’appréciez d’abord pour ses qualités humaines, indépendamment de ses résultats.

LE TRAVAILLOMANE
Sa vision du monde et ses points forts : Logique, organisé, responsable, il perçoit le monde à travers le filtre de la pensée factuelle. Il est tourné vers l’objectif à atteindre et est prêt à y consacrer toutes ses forces. En anglais, ce profil se nomme d’ailleurs “workaholic” (accro au travail) !

Sa question existentielle : Suis-je compétent ?
Ses besoins psychologiques : Il a besoin d’être reconnu pour ses capacités et ses réalisations. Il ne se sent bien que lorsque son temps est fortement structuré : il n’apprécie généralement pas l’imprévu, source de désorganisation.
Ses réactions sous l’effet du stress : Sous stress modéré, il devient perfectionniste. Il perd du temps parce qu’il peaufine jusqu’à l’excès et a du mal à déléguer. Sous stress intense, il bascule vite dans le surcontrôle, ce qui peut même le conduire jusqu’au burn-out.
Comment le manager pour en tirer le meilleur ? Ayez avec lui une attitude professionnelle, sans affect ni émotions. Restez factuel : “De quoi as-tu besoin ? Pour quand ?” Allez droit au but, inutile de vous embarrasser de périphrases ou de précautions oratoires. Faites-le plutôt travailler en solo ou avec une seule personne.

LE PERSÉVÉRANT
Sa vision du monde et ses points forts : Observateur, attentif, dévoué, consciencieux, fiable, il perçoit le monde à travers le filtre de ses opinions : il s’engagera d’autant plus facilement dans une tâche qu’il y verra un sens, qu’il croira au bien-fondé de celle-ci.
Sa question existentielle : Suis-je digne de confiance ?

Ses besoins psychologiques : Il veut être reconnu pour ses convictions, son travail. Là où la satisfaction du travaillomane vient de l’atteinte de ses objectifs, la sienne vient de son implication. Il veut contribuer, se sentir utile.
Ses réactions sous l’effet du stress : Sous stress modéré, il attend des autres la perfection et a tendance à se focaliser sur ce qui ne va pas. Il a du mal à encourager, à féliciter. Sous stress extrême, il perd toute tolérance et cherche à imposer ses convictions, sans égard pour celles des autres.
Comment le manager pour en tirer le meilleur ? Montrez que vous admettez ses opinions, à défaut d’y adhérer. Pour cela, reformulez ses propos. Vous lui prouverez ainsi que non seulement vous l’avez écouté mais que vous l’avez compris. Le message : je ne suis pas forcément d’accord avec toi mais je t’écoute et je te respecte.

LE RÊVEUR
Sa vision du monde et ses points forts : Calme, réfléchi, contemplatif, il perçoit le monde à travers le filtre de l’imagination : il doit visualiser les choses avant de les faire. Visionnaire, il a une grande capacité d’introspection et se projette aisément dans l’avenir, mais il peine à prendre des initiatives.
Sa question existentielle : Suis-je voulu ?

Ses besoins psychologiques : Il a besoin de solitude, d’espace pour réfléchir et prendre ses décisions. Il a aussi besoin de temps. Il travaille mieux seul. Les open spaces ne lui conviennent pas !
Ses réactions sous l’effet du stress : Sous stress modéré, il se retire dans la passivité, a du mal à terminer ses phrases et finit par ne plus communiquer. Sous stress intense, il se bloque et attend, sans parler ni agir. Il rêve alors de disparaître, ce qu’il peut éventuellement faire.
Comment le manager pour en tirer le meilleur ? Le rêveur a un besoin absolu de directives claires et précises. N’hésitez pas à utiliser l’impératif afin de le pousser à l’action. En même temps, il faut vous adresser en priorité à son imagination. S’il ne visualise pas le but à atteindre, il aura beaucoup de difficultés à se lancer.

LE PROMOTEUR
Sa vision du monde et ses points forts : Adaptable, charmeur, plein de ressource, il perçoit le monde à travers le filtre de l’action. Il agit d’abord, puis adapte sa conduite selon les résultats. Comme l’empathique, il est intuitif, mais cette intuition le pousse à entreprendre plutôt qu’à ressentir.
Sa question existentielle : Suis-je vivant ?
Ses besoins psychologiques : Il réagit aux défis. Il aime les fortes doses d’excitation sur de courtes périodes, d’autant plus s’il peut obtenir des résultats visibles et rapides. Il a besoin de communiquer sur ses réussites.

Ses réactions sous l’effet du stress : Sous stress modéré, il attend que les autres se débrouillent sans lui. Il ne supporte pas les relations de dépendance. Sous stress intense, il prendra des risques excessifs. Faute d’excitation positive, il en cherchera de façon négative, voire en créant des conflits.
Comment le manager pour en tirer le meilleur ? Rien ne le motive comme l’impression de devoir relever un défi. Adressez-vous à lui très directement, en mettant en avant la performance : “Personne n’a réussi à…” Ne perdez pas de temps à lui demander de longs reportings de son action au cours de réunions interminables.

LE REBELLE
Sa vision du monde et ses points forts : Créatif, ludique, spontané, il perçoit le monde à travers le filtre de ses envies, de ses coups de cœur. Les choses se répartissent entre celles qu’il aime et celles qu’il n’aime pas. Pas de demi-mesure chez lui. Il réagit d’abord à ce qu’il ressent.
Sa question existentielle : Suis-je libre ? Et suis-je acceptable ?
Ses besoins psychologiques : Sa motivation dépend beaucoup de sa relation avec son entourage. Il recherche le contact et l’interaction, dans un environnement stimulant et ludique où il se sent libre d’exprimer sa créativité.

Ses réactions sous l’effet du stress : Sous stress modéré, il s’ennuie, se désengage. Ses grands soupirs signifient qu’il ne comprend plus et nous invite à penser à sa place. Sous stress extrême, il n’assume plus ses échecs et en rejette la responsabilité sur les autres. Ce n’est jamais de sa faute !
Comment le manager pour en tirer le meilleur ? Evitez à tout prix de vous prendre au sérieux avec lui ou de vous montrer moralisateur, plaisantez, adoptez une attitude décontractée, y compris pour aborder des sujets très sérieux. Ce qui importe d’abord pour lui, c’est la manière dont on lui dit les choses.

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